mardi 24 novembre 2015

CI : Décès du camarade Doubaï

Assez de morts sur le campus !


Nous apprenions ce weekend le décès du camarade Konin Wilfried alias « Doubaï », étudiant en master 1 de sciences économiques et membre de la FESCI. Tout en apportant nos sincères condoléances à la famille et aux proches de la victime, il nous faut également nous exprimer sur les conditions qui ont mené à un tel malheur, afin que chacun prenne ses responsabilités et que ce genre de choses ne se reproduisent plus.

Voici donc notre analyse des faits tels qu'ils nous ont été signalés par des témoins oculaires dignes de confiance, et les conclusions que nous en tirons.

Reporters du CIO-CI à l'université FHB


C'est mercredi 18 novembre à 17 h qu'un détachement de la FESCI (Fédération étudiante et scolaire de Côte d'Ivoire) est intervenu sur le quai de chargement des bus du campus, « géré » par les camarades de l'AGEECI (Association générale des étudiants et élèves de Côte d'Ivoire), pour les en déloger. L'AGEECI ne s'est pas laissé faire, a appelé des renforts et a pourchassé les fescistes jusque sur le campus.

Le lendemain jeudi 19 novembre, les camarades de l'AGEECI ont commencé à faire du bruit. Ils ont décidé de lancer une contrattaque en allant interpeler la direction de l'université sur le fait que sur les quelques résidences nouvellement réhabilitées, seuls les étudiants de la FESCI se sont, selon eux, vus attribuer des chambres ; alors que d'autres bâtiments restent vides malgré la réhabilitation. L'AGEECI est donc partie en groupe occuper les blocs H1 et H3. La FESCI serait à nouveau intervenue pour les en déloger.

C'est suite à la bagarre qui a éclaté (dans laquelle machettes, couteaux et gourdins sont sortis) que deux étudiants, tous deux membres de la FESCI, ont été grièvement blessés et transférés au CHU. C'est ainsi que vendredi matin, on a annoncé la mort du camarade Doubaï. Un autre militant de la FESCI, le camarade Asseu Laurent Patrick, serait quant à lui toujours dans un état critique.


Cette situation nous interpelle à plusieurs titres.

1. En quoi la « gestion » des quais de bus est-elle si importante ?

Serait-ce une source de revenus, de prestige ou de privilèges indus ? Il est vrai que, vu le manque criant de bus qui dessert le campus, l'arrivée d'un véhicule provoque toujours des bousculades qui ont déjà mené à la mort ou à la mutilation de plusieurs étudiants. Il est donc bienvenu que des rangs soient organisés et une certaine discipline assurée afin d'éviter de tels désastres. 

Cependant, c'est pour nous à la Sotra que revient le devoir de détacher des agents responsables de la bonne tenue du rang. À défaut, nous ne sommes pas contre le fait que les étudiants prennent sur eux cette tâche à des fins de volontariat, mais en quoi cela vaut-il la peine qu'on se batte pour occuper ce « terrain » ?

Nous appelons donc les différents syndicats à se mettre d'accord pour un partage équitable de la gestion des quais, tout en s'assurant que cela ne soit pas l'occasion de racketter ou de harceler les étudiants.


Nous appelons également la Sotra à prendre ses responsabilités.

Nous invitons en particulier les travailleurs de la Sotra à approcher les syndicats étudiants qui sont prêts à mener la lutte pour la mise en place d'une plateforme commune de revendications et d'une stratégie d'action. La raison profonde de tout ce chaos étant l'agonie d'une structure pourtant aussi importante que la Société de transports abidjanais.

Plus de bus signifie à la fois plus d'emplois pour les travailleurs et moins de morts et de violence sur le campus. Il faut exiger que les bus passent à une fréquence raisonnable (minimum un chaque quart d'heure sur chaque ligne) et en suivant des horaires affichés sur le quai. Il faut également construire un véritable quai : il est absurde, honteux même, que les étudiants fassent le rang assis sur le toit du hangar qui s'est effondré à peine quelques mois après sa mise en place !

Tout cela nécessite un refinancement public et une gestion valable de la Sotra, chose au caractère bien plus politique qu'on ne veut le croire. (voir notre prochain article sur la question des transports à Abidjan).


2. Pourquoi les résidences ne sont-elles toujours pas accessibles ?

Il est intolérable que les résidences rénovées ne soient toujours pas ouvertes, malgré les nombreux mouvements organisés par les étudiants à ce sujet. Les résidences doivent être libérées et les chambres doivent être attribuées selon des principes démocratiques et non pas en fonction des luttes d'intérêt des syndicats. Une lutte sérieuse doit de plus être menée pour la réhabilitation totale de l'ensemble des résidences universitaires à Abidjan, sous le contrôle de représentants choisis démocratiquement par les étudiants.

Comme pour la question des transports, nous sommes cependant en droit de nous demander à qui profite cette situation ? Qu'on arrête de nous parler de « retards » dans la gestion des dossiers !!


3. Quel est le rôle de la police universitaire sur le campus ?

Pourquoi trouve-t-on normal que les étudiants se machettent pour un oui ou pour un non ? Il faut mettre un terme au climat d'impunité qui règne sur le campus. Les policiers sont toujours prêts à venir nous gazer ou matraquer à la moindre tentative d'organiser un petit meeting pour des causes que nous estimons pourtant justes, mais lorsqu'il s'agit d'intervenir pour faire cesser ces pratiques mafieuses, ils regardent ailleurs !

La racine de tous les problèmes. À la Sotra à prendre ses responsabilités !
Nous appelons en particulier les travailleurs de la Sotra à prendre contact
avec les syndicats des étudiants prêts à mener la lutte pour la mise en place
d'une plateforme commune de revendications et d'une stratégie d'action !

La violence condamnable pas seulement du point de vue moral, mais aussi du point de vue des intérêts supérieurs de la lutte étudiante

Nous concluons de tout ceci que, malgré la bonne volonté et les efforts courageux affichés par certains membres de la FESCI de voir leur syndicat retourner à des traditions de lutte démocratique pour les étudiants, une bonne partie des membres, sans doute encouragée par l'appareil et par les « traditions » en vigueur dans ce mouvement, continue à se conformer à des pratiques condamnables de « lutte d'influence », qui n'ont rien à voir avec le syndicalisme et encore moins avec la défense des droits des étudiants. L'AGEECI n'est évidemment pas en reste non plus.

Nous convions l'ensemble des étudiants honnêtes et de bonne volonté, quel que soit le syndicat dans lequel ils se trouvent (et même, d'ailleurs, s'ils ne sont membres d'aucun syndicat), à se réunir pour envisager la tenue d'une marche ou d'un meeting contre la violence sur le campus, qui pourrait aussi être un premier pas vers la redéfinition des objectifs réels du mouvement étudiant et de l'esprit du syndicalisme étudiant, en vue de la construction d'une plateforme de lutte cohérente répondant aux intérêts des étudiants et non pas de ceux des quelques apprentis politiciens qui usurpent le nom de « leader » et de leurs « parrains » hauts placés.

Il est temps de rompre avec ces pratiques qui décrédibilisent l'ensemble du mouvement étudiant aux yeux de la population et qui, par conséquent, nous empêchent de pouvoir compter sur le soutien de la population et des syndicats de travailleurs dans le cadre de notre lutte.

Pendant combien de temps entendrons-nous encore, à chaque tentative d'organiser une grève ou une marche, la population se plaindre de « Ces étudiants-là, c'est quand qu'ils vont aller au cours au lieu de gâter le pays ? » On ne pourra pas sauver le système éducatif ivoirien sans construire une large plateforme de lutte en lien avec les syndicats des enseignants de la maternelle au secondaire et les associations de parents d'élèves.

Or, cela nécessite de donner une autre image du mouvement étudiant. Organisons-nous donc pour nettoyer le campus des éléments qui nuisent à notre lutte.



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