vendredi 18 octobre 2013

Nigeria : 21ème congrès du DSM

Nombreuses discussions sur les perspectives pour la construction d'une alternative politique de la classe des travailleurs 

Segun Sango leading the discussion on Nigerian situation, DSM congress 2013, photo DSM
Le camarade Segun Sango, secrétaire général du DSM, lors du congrès
Compte-rendu par notre camarade H.T. Soweto, président de la Campagne pour le droit à l'enseignement au Nigeria

Le 21ème congrès du Mouvement socialiste démocratique (DSM, section nigériane du CIO) qui s'est déroulé du samedi 5 au dimanche 6 octobre 2013 a été un grand succès tant sur le plan politique qu'organisationnel. Environ 80 délégués et observateurs représentant 17 sections dans tout le pays ont assisté au congrès.


Le congrès s'est déroulé dans un contexte de questionnement très large parmi la population et de craintes répandues quant à ce que réserve l'avenir pour la population rapidement croissante du Nigeria. Pendant le congrès, la grève de l'ASUU (Union du personnel académique des universités) donnait l'impression de pouvoir jouer le rôle d'une étincelle permettant l'apparition de larges actions de solidarité, ce qui aurait pu déclencher un nouveau puissant mouvement contre le gouvernement Jonathan lui-même. Il était clair lors du congrès que les membres et sympathisants du DSM allaient tout faire pour faire passer à un niveau supérieur la campagne avec la désignation d'une journée nationale pour sauver l'enseignement.

Tous les participants au congrès étaient d'avis qu'une nouvelle période est en train de s'ouvrir. Le DSM – section nigériane du Comité pour une Internationale ouvrière – a été fondé lors de son premier congrès en 1987. Cela fait plus de vingt ans, pendant lesquels nous avons connu des période de succès comme des périodes de défaites dans le cadre de notre construction des forces du marxisme. Après avoir vécu ses dix premières années sous la dictature, le DSM a parcouru un bon bout de chemin et a enduré maints orages. Le congrès a été à plusieurs égards le moment de dresser un bilan du travail de notre organisation depuis lors. Plus de la moitié des participants au congrès étaient des jeunes, ce qui montre le potentiel pour nous d'obtenir une croissance durable. Certains de ces jeunes jouent déjà un rôle crucial dans différents secteurs de notre travail. Beaucoup des personnes présentes participaient aussi à un congrès pour la première fois, ce qui montre que malgré les difficultés, nous sommes parvenus à continuer à recruter.

Comrades at the Congress, photo by DSM
Les camarades lors du congrès

L'ambiance lors du congrès était très conviviale et enthousiaste. La réunion des étudiants qui s'est déroulée le vendredi – la veille du congrès – a duré jusque tard dans la soirée. Lors de cette réunion, les camarades étudiants ont débattu des grèves en cours en ce moment dans le secteur de l'enseignement et des mots d'ordre et méthodes qui sont nécessaires afin de construire la lutte jusqu'à la victoire. La même chose s'est passée lors de la première journée du congrès. La raison en est que, à cause des trop longs intervalles entre deux réunions nationales en raison de considérations financières, il y avait tellement de choses à discuter en même temps. Malgré la fatigue à cause des très longues heures passées assis sur une chaise, tout le monde a participé de manière active tout au long du congrès, du début à la fin.

Les points forts du congrès ont été les discussions sur les perspectives du Nigeria, les relations mondiales, la construction du Parti socialiste du Nigeria (SPN), les rapports des différentes sections, l'élection d'un nouveau Comité exécutif national (CEN) pour le DSM. Plusieurs messages de solidarité ont été lus de la part des sections du CIO en Europe, en Israël/Palestine et du monde entier. Pour les camarades, ces messages de leurs frères et sœurs du monde entier ont été une grande source d'encouragement afin de nous aider à tenir bien haut notre drapeau. Cette solidarité internationale était qui plus est matérialisée par la présence au congrès de notre camarade Robert Bechert du Secrétariat international du CIO, qui a introduit la discussion sur les évènements et développements dans le monde entier, surtout vu l'impossible crise du capitalisme mondial, la lutte des travailleurs et des jeunes partout dans le monde, et les perspectives pour la révolution socialiste. Nous avons également bénéficié de la présence du camarade Dalaï, qui représentait le nouveau groupe sympathisant du CIO en Côte d'Ivoire.

Dalai from Cote d Ivoire
Le camarade Dalaï de Côte d'Ivoire

Dans l'introduction à la discussion sur les perspectives pour le Nigeria réalisée par le camarade Segun Sango, secrétaire général du DSM, il a été rappelé qu'à peine quelques jours avant de célébrer son centenaire, le Nigeria est confronté à un avenir extrêmement incertain, à moins que les masses laborieuses ne s'organisent pour s'emparer du pouvoir politique. Tandis que la crise socio-économique se poursuit toujours plus, entrainant dans son sillage une misère et un chômage croissants malgré la croissance économique, les conflits ethno-religieux et l'agitation en faveur du séparatisme pointent à nouveau leurs laids visages. En réalité, au fur et à mesure que se rapprochent la fête du centenaire et les élections générales de 2015, la question nationale deviendra un problème de plus en plus pressant, requérant une solution urgente, que la bourgeoisie et le système capitaliste sont incapables d'apporter.

La question nationale de plus en plus pressante

Quelques jours avant le congrès, le président Jonathan s'est dit en faveur de la convocation d'une Conférence nationale. Mais il ne s'agit là que d'une manœuvre de la part du gouvernement afin de détourner l'attention des vrais problèmes qui sont le chômage, la misère, la fermeture des universités et des hautes-écoles à cause des grèves dans l'enseignement, etc. Toute conférence organisée par ce gouvernement ne sera qu'un club de discussion à des fins de diversion. Nous ne pouvons accorder la moindre confiance à aucune section de l'élite capitaliste pour organiser une conférence nationale qui serait véritablement souveraine et démocratique et qui puisse garantir les intérêts de la classe des travailleurs, des jeunes et des masses pauvres, ainsi que des divers groupes ethniques et religieux du pays.

Nous autres, véritables socialistes, sommes pour la convocation d'une Conférence nationale souveraine démocratique, mais une conférence qui soit convoquée par la population elle-même, via ses organisations de masse, et à laquelle la vaste majorité des participants soient des représentants élus de la population laborieuse pauvre, avec un mandat afin de débattre de manière démocratique de l'avenir du Nigeria et de savoir si oui ou non il faudrait que ce pays reste uni. Les véritables socialistes sont pour l'unité du Nigeria, mais nous pensons que cette unité ne peut être maintenue que par l'unification des masses des Nigérians en soutien actif à un gouvernement des travailleurs armé d'un programme socialiste ; nous sommes qui plus est entièrement opposés à l'idée de vouloir maintenir cette unité à tout prix et par la force. C'est pourquoi nous nous battons pour le droit de toute nationalité et de tout groupe ethnique à l'auto-détermination, jusqu'à l'indépendance s'il le souhaite, tant que cette décision est le fruit d'un débat démocratique parmi les travailleurs de cette région.

Beaucoup de camarades se sont levés pour prendre la parole. Un des principaux points du débat a été le rapport des camarades Dagga Tolar et Chinedu Bosah sur les luttes des travailleurs et notre rôle et intervention dans celles-ci. Dagga a récemment été élu président de sa section de l'Union nigériane des enseignants dans le quartier Ajeromi-Ifelodun de Lagos (un quartier populaire qui fait environ trois fois la taille d'Adjamé). Il nous a fait part de la lutte menée par les membres du DSM et par les militants enseignants pour un syndicat démocratique, combatif, et qui tienne compte de ses membres. Le camarade Chinedu (secrétaire à la publicité pour la CDWR – Campagne pour les droits démocratiques et des travailleurs) a raconté la lutte des travailleurs à bas salaire à Durapack (une usine chinoise dont les travailleurs sont traités comme des esclaves) et la campagne de la CDWR parmi ces travailleurs précaires.

Dagga Tolar , photo by DSM
Le camarade Dagga Tolar
 
Le congrès a confirmé la nécessité urgente de construire le Parti socialiste du Nigeria (SPN), surtout vu l'absence de tout effort sérieux de la part du mouvement syndical de construire une alternative politique de la classe des travailleurs. D'ailleurs, vu les déclarations des dirigeants syndicaux au cours des derniers mois, non seulement nous pouvons conclure qu'ils ont laissé tomber toute idée de récupérer le Parti travailliste ; ils semblent également avoir perdu toute confiance dans la capacité de la classe des travailleurs à sauver le Nigeria du désastre. Ils ne sont pas les seuls dans ce pessimisme : bien qu'elles soient enrobés de belles phrases marxistes, les déclarations de la part de la plupart des autres groupes de gauche trahissent le même sentiment.

Malgré les difficultés, le SPN va de l'avant


Construire le SPN en tant que parti politique large qui rassemble tous ceux qui désirent se battre pour le changement au Nigeria et qui puisse apporter une direction politique en ces temps de lutte tout en constituant une alternative pro-travailleurs sur le plan électoral, est la meilleure chose à faire pour aller de l'avant. Bien que certains groupes de soi-disant “gauche” semblent se contenter d'attendre que la situation change d'elle-même, il est de notre devoir à nous autres marxistes de fournir un pont entre la période actuelle et la suivante. Le SPN peut jouer ce rôle pour nous en ralliant toutes les forces qui désirent le changement et en fournissant une opportunité, surtout en période électorale, de mettre en avant un programme socialiste alternatif afin de défier et remettre en question la politique néolibérale des principaux partis capitalistes ; une telle alternative pourrait bénéficier d'une formidable réception dès que la situation objective commencera à évoluer.

D'excellentes nouvelles ont été annoncées quant aux développements dans les activités du SPN depuis la dernière réunion du Comité national du DSM au mois de mars. Les délégués au congrès et autres membres ont appris avec enthousiasme le fait que le parti est parvenu à trouver un bureau à Abuja, sur le territoire de la capitale fédérale, où pourra siéger le Secrétariat national du SPN ; alors que nous avions jusque là cru impossible de parvenir à satisfaire cette exigence cruciale (bien que fortement antidémocratique) de la loi électorale. Nous avons aussi entendu des rapports de tournées et activités à Abuja, au Nord-Ouest, au Centre-Nord, au Sud-Sud et au Sud-Est, dont le but était de construire le soutien pour le SPN, ce qui est également nécessaire si nous voulons satisfaire aux exigences de la loi pour pouvoir faire enregistrer notre parti. En fait, au moment du congrès, le SPN pouvait compter sur des membres et sympathisants dans plus des deux tiers des États qui composent la fédération du Nigeria, tel que requis par la loi électorale. Ceci constitue un développement extrêmement important, qui prouve que quels que soient les obstacles qui se posent sur le chemin de l'émancipation électorale des travailleurs, nous pourrons les surmonter avec détermination.
Au stade où nous en sommes, nous pouvons nous préparer en toute confiance pour l'inscription du parti auprès de la Commission électorale nationale indépendante. C'est pourquoi nous avons fixé la date du 16 novembre pour le congrès de fondation du SPN, auquel le comité exécutif national de ce parti sera élu, de sorte qu'en février 2014, nous puissions présenter ce parti en tant que candidat pour les élections de 2015. Afin de renforcer ce travail, nous avons émis un appel financier pour assister le lancement du SPN. Les camarades du DSM, avec les autres membres du SPN, porteront cet appel auprès du mouvement large des travailleurs, en qui nous avons toute confiance pour le financement d'un parti politique qui soit une véritable alternative via le soutien des deux grands syndicats et les nombreuses contributions indépendantes de travailleurs.

Comrades at the Congress, photo by DSM
Les camarades lors du congrès
 
Ci-dessous, nous publions les liens vers les quatre résolutions (pour l'instant en anglais) qui ont été discutées et adoptées à l'unanimité lors du congrès. Ces résolutions donnent une analyse plus détaillée de notre analyse concernant la situation au Nigeria, en Afrique et dans le monde, la situation de la lutte de classes et de la lutte pour une alternative socialiste.

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