jeudi 4 avril 2013

Nigeria : Victoire à la CAN



Malgré la victoire du Nigeria à la CAN : les problèmes fondamentaux sont toujours présents

La victoire bien méritée des Super Eagles
 La victoire du Nigeria lors de la Coupe d’Afrique des nations (CAN) 2013 en Afrique du Sud prouve bien qu’il n’y a aucun problème avec la “personnalité nigériane”. De manière générale, les Nigérians ont démontré leur excellence dans de nombreuses sphères, malgré la faillite monumentale de leur élite dirigeante capitaliste et cleptomane. La victoire des Super Eagles, l’équipe nationale nigériane, représente un grand réconfort pour l’immense majorité des Nigérians, qui n’avait jusque là rien pour réconcilier leur cœur avec leur pays, malgré ses immenses ressources naturelles et humaines. Chaque jour, les Nigérians se réveillent pour affronter le cauchemar socio-économique et l’atmosphère maussade qui règne dans leur pays. La télévision, la radio et les journaux ne font que déverser une litanie de nouvelles de corruption, d’attentats terroristes, de banditisme et de violence ethno-religieuse, tout cela étant la conséquence de la mauvaise gouvernance ; en plus de toutes les annonces des dernières attaques néolibérales capitalistes sur les conditions de travail et de vie des travailleurs, etc. 

Article du Democratic Socialist Movement Nigeria, section nigériane du CIO



En vérité, la victoire des Super Eagles est un triomphe de la volonté face à l’adversité engendrée par la faillite du gouvernement. Le fait qu’il a fallu dix-neuf ans au soi-disant géant de l’Afrique, avec sa population de 170 millions d’habitants, pour remporter la Coupe des nations, démontre bien l’ampleur des problèmes qui affligent le sport nigérian. Dans l’euphorie de la victoire, il ne faut pas oublier ceci. Tout récemment encore, le Nigeria nous avait offert une si piètre prestation aux Jeux olympiques de Londres 2012 que nos athlètes étaient rentrés au pays sans la moindre médaille. Afin de pouvoir jouer les matchs de qualification pour la CAN, les responsables du football nigérian ont dû parcourir tout le pays avant de trouver un terrain de foot praticable ; car le stade national d’Abuja, qui a couté une fortune de plusieurs millions de dollars au pays afin d’y recevoir la Coupe du monde des minimes de 2009, a déjà été entretemps envahi par des herbes géantes et des buissons.

La contribution cruciale de cinq joueurs résidant au pays au succès des Super Eagles a révélé le potentiel et le talent qui vivent parmi les joueurs qui n’ont malgré tout jamais pu aller plus loin que leur championnat local. Mais il serait malvenu d’utiliser cet argument afin de faire oublier la crise colossale qui sévit parmi la Nigeria Premier League, qui est un des championnats les moins bien organisés de toute l’Afrique. Alors que nous écrivions cet article à la fin février, la saison 2012-13 n’avait toujours pas commencé au Nigeria, alors qu’elle touche déjà à sa fin en Europe ! En outre, les joueurs sont mal payés et ne reçoivent pas leurs salaires avant plus d’un an après avoir rejoint leur club. La question du non-paiement des salaires des joueurs a même forcé les joueurs des Sunshine Stars d’Akure (état d’Ondo) à partir en grève avant leur match contre Al Ahly en Égypte l’année passée. Dans un pays immense mais dépourvu du moindre véritable réseau de chemin de fer, les joueurs sont contraints de se déplacer par la route, passant parfois plus de 24 heures dans le bus juste avant un match.

Tout cela explique pourquoi les joueurs nigérians qui ne parviennent pas à s’insérer dans un club européen, n’hésitent cependant pas à rejoindre s’ils le peuvent un championnat moins “glamour” en Russie ou Asie, où le salaire et les conditions sont tout de même bien meilleurs qu’au pays. Certains d’entre eux, désespérés de pouvoir aller exposer leurs talents ailleurs, se retrouvent impliqués dans de sordides histoires sous l’emprise de managers véreux.

De même, il n’existe quasi aucune politique de développement du sport à l’échelle locale. Le sous-financement et les attaques capitalistes néolibérales sur l’enseignement public ont mené à la multiplication de petites écoles privées dont la plupart ne possèdent pas le moindre terrain de jeu ou de sport sur lesquels de nouveaux talents pourraient se développer. Même dans les écoles publiques, ces installations sont complètement dégradées. Voilà la raison pour laquelle les écoles nigérianes ne produisent plus de sportifs talentueux comme dans le passé.

Plutôt que d’investir dans le développement du sport, les politiciens capitalistes préfèrent simplement arroser les joueurs déjà victorieux de montagnes d’argent, puis attendre que le hasard des circonstances leur amène une nouvelle victoire. Nous devons au contraire investir des ressources publiques dans la construction et le développement d’installations sportives aux niveaux national et régional, mais aussi au niveau local dans les écoles et les quartiers, afin de révéler et développer les talents. Sans cela, le Nigeria continuera à se trainer en bas de classement et à attendre éternellement que la chance lui sourie à nouveau avant sa prochaine victoire. Nous voulons cependant également ajouter qu’afin d’assurer que de tels investissements atteignent réellement leurs buts et afin d’éviter la corruption qui est si répandue dans le milieu du sport, toute cette politique d’investissement sportif doit être placée sous le contrôle démocratique des travailleurs, des joueurs, des professionnels et des habitants des quartiers.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire